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Guerlédan, le lac asséché révèle un paysage lunaire
Jusqu'au mois de novembre 2015 le lac asséché de Guerlédan délivre les secrets de la vallée engloutie en 1930. Le Blavet a retrouvé son lit et les écluses qui jalonnaient son parcours. Les maisons des éclusiers, des corps de fermes, des vergers entourés de muret de pierre sont encore sur pied. La visite du lac de Guerlédan en assec est un transport dans l'espace et dans le temps propice à la découverte.
La construction du barrage modifia à jamais la vallée
Entre Morbihan et Finistère, le canal de Nantes à Brest alimenté par le Blavet était ponctué par des écluses qui rendaient la rivière navigable. Il traversait un magnifique vallon boisé d'essences diverses dont des chênes et beaucoup de châtaigniers. À flanc de colline des ardoisiers trimaient dur pour extraire les matériaux utilisés pour la construction. Dans la vallée luxuriante il y avait des maisons d'éclusiers mais aussi des exploitations agricoles. Mais tout ça c'était avant la construction du barrage décidé par Joseph Ratier sous-préfet de Pontivy qui confia le projet à l'ingénieur Auguste Leson pour bâtir un barrage de 40 mètres de haut destiné à produire de l'électricité qui manquait fortement au début du 20e siècle. Après avoir relevé de nombreux défis autant techniques que financiers le barrage et l'usine hydroélectriques sont inaugurés en 1930. Depuis cette période le cours navigable du canal de Nantes à Brest est interrompu entre Saint-Aignan et l'abbaye du Bon Repos.
L'exploration par robot permet l'évaluation du besoin de maintenance du barrage
Au 20e siècle le barrage fut vidé à quatre reprises pour maintenance ; le précédent vidage eut lieu en 1985. Trente ans séparent donc ces deux opérations qui rendent donc l'événement exceptionnel. L'évolution des techniques permet désormais de programmer la maintenance du barrage au moment opportun, en effet ce sont des robots qui explorent désormais le barrage pour mesurer l'état de santé de l'ouvrage.
Le fond du lac révèle l'histoire des lieux
Dans l'anse de Sordan, un vieux bateau éventré, immergé depuis des décennies repose sur son flanc. Les peintures encore bien conservées donnent de la vie au décor austère du fond de lac.
A l'approche de l'anse de Sordan, le Blavet a réintégré son lit naturel. Sur le versant, l'eau en se retirant a laissé un couche limoneuse qui sous l'action du soleil se craquèle en séchant formant une mosaïque géante. Dans la vallée envasée, les silhouettes des arbustes qui peuplaient ces lieux sont encore sur pied laissant libre cours à l'imagination pour visualiser le décor originel du site.
Ecluse de Trégnanton : On remarque l'état d'envasement du lieu, plusieurs mètres à certains endroits. La ligne vert sombre de la forêt avoisinante contraste avec la teinte brune des alluvions.
Ecluse en amont de Trégnanton : L'envasement est évident, la maçonnerie de l'écluse en parfait état de conservation émerge à peine de sa gangue limoneuse. Les silhouettes reconnaissables de châtaigniers peuplent encore ce lieu étrange.
Le Blavet à l'écluse du Pouldu : Les vergers entourés de murs de pierre sèche sont demeurés intacts, comme au premier jour de l'immersion ou presque. La maison de l'éclusier et les bâtiments annexes suggèrent l'existence d'une activité pastorale.
De nombreuses souches jalonnent les versants du lac, partiellement minéralisées par un long séjour dans l'eau, les voici libérées des flots, encore majestueuses dans la vallée qui les a vu grandir.
La pollution s'invite dans le décor irréel, presque lunaire du lac
Une machine à coudre repose sur un versant rocailleux du lac; malgré un long séjour dans l'eau, elle laisse la signature d'une marque de renommée mondiale qui accompagna tant de couturières et de mères de familles. Comment a t'elle pu être abandonnée ici, car enfin un lac fût-il artificiel n'est pas une décharge !
Plaisanciers, pêcheurs qui êtes passés en ces lieux, qui avez profité de la tranquillité du plus grand lac de Bretagne, qu'avez vous fait de vos canettes de bière ? La réponse est apportée par les visiteurs qui ont regroupé les verres sur une ligne de plus de dix mètres. A la place de cette pollution horizontale combien aurais-je préféré voir un cairn signant la singularité des lieux !
Tags : lac, guerledan, barrage, asseche, paysage, lunaire
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Commentaires
Comme toujours certains humains jouissent de lieux privilégiés sans faire le moindre effort de réflexion sur le minimal correct pour respecter l'environnement. La moindre des choses serait de remporter toute matière non consommable pour éviter une pollution durable des lieux, malheureusement la conscience humaine a encore du chemin à réaliser. Malheureusement, l'inconscience humaine continue, ainsi les quatre millions de visiteurs attendus sur le site vont encore contribuer à noircir le tableau. J'ai vu l'illustration de la bêtise humaine : Des adultes déplaçaient des gros blocs rocheux pour les faire dévaler dans la vallée, ces rochers de plusieurs centaines de kilos arrachaient ou brisaient des arbres sur leur passage...Encore un manque d'irrespect par rapport à un environnement resté quasiment en l'état depuis l'immersion de la vallée !
Merci de suivre pour nous, en mots et impressionnantes photos, cette "vidange" du lac.
Cette terre à découvert, sans une herbe ni une fleur, se recouvrerait-elle rapidement de vie verte si on lui en laissait le temps?
Sur les versant, des herbacées sont déjà levées. Dans deux mois je suppose que les parties limoneuses en seront couvertes.
5ApollineDimanche 31 Mai 2015 à 09:57
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Un reportage saisissant tant du point de vue des images que des commentaires qui accompagnent l'historique de ce lieu. J'aime tout particulièrement la première image de la barque conservée au fond de l'eau; tout comme la ligne des arbustes, la mosaïque étonnante due au retrait de l'eau .L'image de la machine à coudre (ce cliché mériterait d'être publié) et des canettes est pour moi un désespoir éprouvé envers le genre humain devant l'utilisation d'un lieu aussi privilégié à des fins de poubelle.